LA LIGNE CHAUVINEAU
LE GÉNÉRAL CHAUVINEAU
Naît le 12 octobre 1874 à Loudun.
Polytechnique puis école d'application de l'artillerie et du génie
Rejoint l'Etat
Major du Général Pétain en 1914, participe aux combats d'Arras, aux
offensives en Artois et à la bataille de Verdun.
Est nommé professeur titulaire du cours de fortification à l'Ecole supérieure de guerre en 1919.
Nommé au poste de commandant du génie
de la région de Paris du 2 septembre 1939 au 1er juin 1940.
Décorations :
24
avril 1916 : Chevalier de la Légion d'Honneur.
21 décembre 1926 : Officier de la
Légion d'Honneur
30 décembre 1936 : Commandeur de la
Légion d'Honneur.
Officier du Saint Sauveur. Grèce.
Mérite militaire Hellénique.
Médaille commémorative Serbe.
Ordre Royal de Saint Sava de
Yougoslavie.
Grand officier de l'ordre de la
Couronne de Roumanie.
Ordre de Jade. Chine
SA CARRIÈRE
Louis Gabriel Alfred Narcisse Chauvineau naît le 12 octobre 1874 à Loudun. Il est le fils de Narcisse Chauvineau, secrétaire de mairie et percepteur des contributions directes et de Blanche Maurat. Le futur général entre à l’Ecole polytechnique en octobre 1895. Il en sort à la 172ème place et choisi l’École d’application de l’artillerie et du génie qu’il rejoint avec le grade de sous-lieutenant. En 1899, sa formation terminée, il intègre le 6ème régiment du génie avec le grade de lieutenant jusqu’en 1902 date à laquelle il est nommé instructeur à l’école de l’artillerie et du génie. Il passe capitaine en octobre 1903 et à partir de février 1904, il y assure le cours de fortification. Après un passage au 4ème régiment du génie en 1908, il rejoint l’École supérieure de guerre à Paris. Durant cette période, il épouse Germaine Fuzée dont il aura 4 enfants. En octobre 1911, il rejoint comme stagiaire l’État-major du 10ème corps basé à Rennes. En 1913 il est affecté à l’État-major du gouverneur militaire de Paris.
A la déclaration de la guerre, il rejoint l’État-major du
général Pétain au 33ème corps d’armées et participe activement au
combat d’Arras le 1er septembre 1914. Puis ce sont les offensives en
Artois en mai et en septembre 1915 au cours desquelles il reçoit sa première
citation : « Depuis la
formation du corps d’armée, assura avec un zèle inlassable et une précision
tout à fait remarquable la direction du 1er bureau du corps d’armée,
à fait face à toutes les difficultés d’un service très
chargé grâce à un travail incessant et un dévouement sans borne ».
Le général
Pétain entouré de son Etat-major. Le commandant Chauvineau est le 5ème
en partant de la droite. (Collection famille Chauvineau)
Il est nommé chef de bataillon le 3 septembre 1915. Le 11 mars 1916, il
prend le commandement du génie de la 77ème division qui est engagée
à Verdun fin mars. Pour son action durant cette période, il reçoit la Légion
d’honneur avec la citation suivante : « Commandant le Génie d’une division dans un des secteurs les plus
importants et les plus menacés par une violente offensive ennemie, a montré une
bravoure, une énergie, une sûreté de jugement et un esprit de suite remarquable
pour l’organisation des travaux défensifs et des communications, ayant ainsi
contribué à la défense du secteur ».
Nommé dans
l'ordre de la Légion d'Honneur au grade de chevalier (ordre 2800 du grand
quartier Général du 24 avril 1916).
Le
commandant Chauvineau dans le secteur de Verdun. (Collection famille
Chauvineau)
Il réintègre en juin l’Etat-major du 33ème CA au sein duquel il
participe aux combats sur la Somme d’août à octobre puis à l’offensive sur le
chemin des dames en juin et juillet 1917. Ses actions seront récompensées par
une 2ème citation : « Officier
supérieur de grande valeur aussi pondéré dans les conseils qu’énergique dans
l’action. Toujours calme même dans les situations les plus difficiles et dans
les zones bombardées, à contribué largement par sa
remarquable prévoyance et son inlassable activité au succès des opérations
offensives exécutées par le corps d’armée en mars, avril et juillet 1917 ».
Guerre
1914-1918. Le commandant Chauvineau est le 1er en partant de la
gauche. (Collection famille Chauvineau)
Il est choisit en septembre 1917 pour faire partie de la mission militaire française auprès de l’armée Hellénique d’abord à Athènes puis à Salonique. Il restera à ce poste jusqu’au 22 octobre 1918 date à laquelle il revient en France.
Le
commandant Chauvineau (2ème en partant de la gauche) est décoré par le général Franchey d'Esperet. (Collection
famille Chauvineau)
Après un passage à l’Etat-major du département de la Seine-et-Oise, il retourne à l’Ecole supérieure de guerre en août 1919 comme professeur titulaire du cours de fortification, matériel de génie et de télégraphie. Il se fera rapidement remarquer à ce poste comme en témoigne l’appréciation du général Héring : « Professeur incomparable dont le cours de fortification a fait sensation, non seulement dans cette enceinte, mais dans le monde militaire, par la ( ?) qui la inspiré, par son caractère extra-lumineux et aussi son originalité ».
Parmi ses élèves, on peut citer les futurs maréchal Juin en 1920, général De Gaulle en 1922 ainsi que le fils du roi de Siam. Ce dernier, après son accession au trône, lui décernera l’ordre de « L’Eléphant Blanc ».
Il obtiendra le grade de lieutenant-colonel le 23 décembre 1921 et celui de
colonel le 23 décembre 1925. En septembre 1926, il prend le commandement du 1er
régiment du génie de Versailles puis en 1927, celui de l’Ecole militaire et
d’application du génie, directeur également du centre d’études tactiques du
génie de Versailles. Il est nommé officier de la Légion d’honneur le 21
décembre 1926, accède au grade de général de brigade le 8 juillet 1930. Durant
cette période, il reçoit plusieurs lettres de félicitations pour le travail
accompli, d’abord le 27 janvier 1931 : « Chargé depuis près de 3 ans de l’école de perfectionnement des officiers
de réserve du génie (sapeurs mineurs) de la région de Paris, a été un animateur
et un organisateur de tout premier ordre, a réalisé des progrès très importants
grâce à son dévouement et son activité », puis le 18 janvier 1931 et enfin le 19 janvier 1935 : « Animateur très importants à l' école de perfectionnement
d’officiers et de sous-officiers du génie de la région de Paris. A développé et
orienté d’une heureuse façon l’instruction et a obtenu d’excellents résultats ».
En 1934 il est nommé commandant du génie de la 7ème région militaire à Besançon. C’est à ce poste qu il est promu général de division le 11 septembre 1934.
Finalement, le 12 octobre 1936, il cesse son service et passe dans la 2ème section du cadre de l’Etat-major général. A cette occasion, il reçoit la croix de guerre (une palme, 2 étoiles vermeil) et est promu commandeur de la Légion d’honneur. Ses actions sur les théâtres d’opérations extérieures lui valent plusieurs distinctions et décorations étrangères : Officier de l’ordre royale du sauveur (Grèce), Mérite militaire hellénique, Médaille commémorative serbe 1914 -1918, Ordre royal de Saint Sava de Yougoslavie, Grand officier de l’ordre de la couronne de Roumanie, ordre du jade (Chine).
La deuxième guerre mondiale lui fait reprendre du service au poste de commandant du génie de la région de Paris du 2 septembre 1939 au 1er juin 1940. C’est durant cette période qu’il dirige la construction de la position de sûreté de la région parisienne. Pour la réalisation de cette œuvre dont la valeur s’est manifestée au moment ou l’ennemi s’est présenté , il est proposé au grade de grand officier de la Légion d’honneur à titre très exceptionnel.
Il réintègre le cadre de réserve le 1er juillet 1940 marquant ainsi la fin de sa carrière militaire.
SES CONCEPTIONS DE LA FORTIFICATION
C’est au cours de son passage comme professeur à l’Ecole supérieure de guerre que le général Chauvineau commence à développer ses théories sur le rôle de la fortification permanente en France. En 1924, dans son cours intitulé « Défense des frontières et fortification permanente », il tire les conséquences du premier conflit mondial et expose ses vues sur ce sujet en prévision d’une nouvelle confrontation avec l’Allemagne. Un des chapitre concerne plus particulièrement la création d’une ligne de défense fortifiée le long de la frontière. Il y expose ce que devrait être son organisation et propose que celle-ci soit constituée par une première ligne de points d’appui très solides et distant les uns des autres de 1000 à 1500 mètres au plus ; ceux-ci devant être constitués par de gros blocs en béton n’ayant qu’une issue souterraine en arrière et desservant le PC du chef de bataillon ou du colonel dont dépend l’ouvrage.
L’ouvrage se réduit donc à une grosse casemate de Bourges double, sans fossé. Son armement principal est dirigé sur les flancs et vers l’arrière. Il est protégé contre les coups d’embrasure de l’artillerie ennemie par des murs de masque. Chaque ouvrage comprend une tourelle de mitrailleuse (M), une tourelle de 75 mm (C), deux observatoires (O), des créneaux pour l’armement de flanquement (f), des créneaux pour l’armement de revers (r), des flanquements pour la défense rapprochée (a) et enfin une cloche métallique pour battre le fossé diamant à l’arrière (T).
Représentation schématique d'un point d'appui concentré. Cours
fortification du Lt Colonel Chauvineau – 1924.
(Bibliothèque du SHAT).
La protection de l’ouvrage devait être assurée par ses armes propres (tourelles, cloches lance grenades, etc.), par les feux des ouvrages voisins, par l’artillerie et les mines de la position de résistance et par les armes automatiques de la ligne de résistance.
En arrière, devait être établie une zone profonde de 1500 à 2500 mètres suivant le terrain, dans laquelle on retrouve l’organisation ordinaire d’une position de campagne avec seulement des abris à l’épreuve pour une demi-compagnie. Cette position étant occupée par des bataillons accolés. Chaque bataillon correspondant à un point d’appui.
A la lisière arrière enfin, un barrage était obtenu au moyen de tourelles de mitrailleuses. L’ensemble de la ligne étant contrôlé par une organisation permanente de commandement (observatoires, PC, transmissions, etc.).
Pour terminer cet exposé sur les propositions du général Chauvineau concernant l’établissement d’une fortification permanente à établir en temps de paix et qui préfigure les différentes solutions devant aboutir à la conception de la future ligne Maginot, nous citerons intégralement la conclusion de son cours de fortification :
" Voilà une accumulation de moyens qui fera de cet îlot de matière
dure, sur lequel on ne peut se cacher parce qu’il n’y a ni trous ni tranchées
possibles, un endroit des plus indésirables pour l’adversaire. Pour arriver au
contact de la ligne de résistance, l’ennemi devra traverser la zone laissée
tout exprès aussi nue et aussi bien vue que possible, zone de mort battue par
toutes les armes que nous venons d’énumérer. Nous croyons que les difficultés
qu’il rencontrera pour atteindre le contact et surtout pour le maintenir
obligeront l’ennemi à se débarrasser préalablement des forts qui le gênent. Il
se décidera à lutter d’abord contre la fortification permanente, ce qui pour le
défenseur est justement le but a
atteindre.
Cette lutte exige en effet de gros canons, des munitions, du matériel. Elle
suppose l’installation par l’ennemi d’une position (en avant des points
d’appui) qui sera à la fois sa couverture, puis sa base de départ. C’est une
affaire de semaines, plus probablement de mois, pendant
lesquelles il subira des pertes inévitables. Pendant ce temps
là, le défenseur, placé sous des cuirasses à l’épreuve, économisera ses
effectifs.
Et les bataillons (déployés en arrières des points d’appui) seront analogues à
ces forces policières que l’on dissimulent en
prévision d’une manifestation et que les manifestants ne voient que dans les
grandes occasions.
Le soldat français sera vraiment en réserve. Il assistera presque en
spectateur à la lutte de l’ennemi contre du matériel et du béton.
Mais il sera là, car sa présence est aussi nécessaire que celle des réserves en
arrière d’un front. Or un pareil front, avec un commandement organisé disposant
d’artillerie et de réserves, ne sera pas à la merci d’une attaque brusquée».
Le général Chauvineau est également l’auteur d’articles parus dans la « Revue Militaire Française », notamment « Points d’appui et centres de résistances » dans le numéro d’avril – juin 1927, « L’organisation du terrain et ses conséquences » janvier – mars 1930 et « L’organisation du terrain à une aile. Première étude sur carte » janvier – mars 1932.
Il exposa une nouvelle fois en 1939 ses théories sur la fortification et sur le
rôle de l’armée dans un livre préfacé par le Maréchal Pétain : « UNE
INVASION est-elle ENCORE POSSIBLE ». (Nous donnons de larges extraits de
cet ouvrage en annexe à la fin de ce livre).
Enfin, comme beaucoup d’officiers de sa génération, il sous-estime l’action des blindés, du génie en matière de franchissement et des armes nouvelles. N’oublions pas que dans le manuel du gradé d’infanterie en usage en 1938, le rôle des chars est encore défini comme étant destiné « à accompagner l’infanterie, à lui faciliter sa progression, en brisant les obstacles passifs ou les résistances actives qui se présentent sur le terrain de combat(…). Les chars sont des moyens d’actions supplémentaires, mis temporairement à la disposition de l’infanterie, dont ils renforcent considérablement l’action, mais qu’ils ne remplacent pas ».
ARTICLES PARUS DANS LA "REVUE MILITAIRE FRANÇAISE"
(éditée par la Librairie Militaire Berger - Levrault)
POINTS D'APPUI ET CENTRES DE RÉSISTANCES
- Avril Juin 1927 -
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L'ORGANISATION DU TERRAIN ET SES CONSÉQUENCES
- Janvier 1930 -
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TEXTES DE CONFÉRENCES FAITES PAR LE GÉNÉRAL CHAUVINEAU
Cliquez sur l'image pour accéder au texte intégral de chaque conférence.
PRÉFACE DU LIVRE DU GÉNÉRAL CHAUVINEAU - "Une Invasion est-elle encore possible" - par le maréchal Pétain (1938)
Cliquez sur l'image pour accéder au texte intégral de la préface.
sous forme de deux articles parus les 10 mai 1939 et 25 mai 1939.
UNE INVASION est elle encore possible ? (*)
par le Général DUFIEUX (du cadre de réserve)
(*) Une invasion est elle encore possible ? par le
général Chauvineau. Préface de M. le maréchal Pétain. Editions Berger-Levrault
CARNET DE ROUTE DU GÉNÉRAL CHAUVINEAU
Campagnes :
Contre l'Allemagne : 2 août 1914 au 30 septembre 1917.
Orient : 1er octobre 1917 au 22 octobre 1918.
Contre l'Allemagne : 23 octobre 1918 au 11 novembre 1918.
Contre l'Allemagne : 1er septembre 1939 au 30 juin 1940.
Combats :
Combats d'Arras : 1er septembre 1914.
Attaque d'Artois : mai 1915.
Attaque d'Artois : septembre 1915.
Verdun : fin mars 1916.
Somme : août, septembre et octobre 1916.
Chemin des Dames : juin et juillet 1917.
Citations :
Ordre du 33ème CA n°57 du 21 mai 1915. "Depuis le formation du corps d'armée, assura avec un zèle inlassable et une précision tout à fait remarquable la direction du 1er bureau du corps d'armée, à fait face à toutes les difficultés d'un service très chargé grâce à un travail incessant et un dévouement sans borne".
Ordre du GQG n° 2800D du 26 mai 1916. Chevalier de la légion d'honneur. "Commandant le génie d'une division dans un des secteurs les plus menacés par une violente offensive ennemie, a montré une bravoure, une énergie, une sûreté de jugement et un esprit de suite remarquable pour l'organisation des travaux défensifs et des communications, ayant ainsi contribué à la défense du secteur".
Ordre du 33ème CA n°147 du 28 août 1917. "Officier supérieur de grande valeur aussi pondéré dans les conseils qu'énergique dans l'action. Toujours calme même dans les situations les plus difficiles et dans les zones bombardées, a contribué largement par sa remarquable prévoyance et son inlassable activité, au succès des opérations offensives exécutées par le corps d'armée en mars, avril et juillet 1917".
Lettres de félicitations :
Lettre de félicitations du Ministre du 27 janvier 1931 avec mention au bulletin officiel. "Chargé depuis près de 3 ans de l'école de perfectionnement des officiers de réserve du génie de la région de Paris, a été un animateur et un organisateur de tout premier ordre, a réalisé des progrès très importants grâce à son dévouement et son activité.
Lettre de félicitations n° 2248/M du 18 janvier 1932 avec mention au bulletin officiel. "Dirige depuis près de quatre ans l'école de perfectionnement des officiers de r"serve du Génie (sapeurs-mineurs) de Versailles. Obtient les meilleurs résultats".
Lettre de félicitations n°1943/M du 19 janvier 1935 avec mention au bulletin officiel. "Animateur très important de l'Ecole de perfectionnement d'officiers et de sous-officiers du génie de la région de Paris. A développé et orienté d'une heureuse façon l'instruction et a obtenu d'excellents résultats".